lundi 31 août 2009

34 - Épouse et n'épouse pas ta maison.

Épouse et n'épouse pas ta maison.

3 commentaires:

  1. je l'habite ,j'y suis bien ..elle m'entoure !
    Je la quitte sans état d'âme pour une autre ,où je serai bien aussi .
    Elle m'accueille un certain temps ,des amis passent ...et le besoin de partir est plus fort!
    elle ne sera jamais un piège refermé .

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  2. Épouse et n'épouse pas ta maison.


    1-Comment je ressens cela ? Quelles images mentales me sont évoquées, apportées, provoquées par cet aphorisme de René Char ?

    Une réponse possible de LD :
    En français, la conjugaison du verbe épouser au singulier est un mot homophone de la personne de l' « épouse », la femme mariée. On voit cette femme, et on voit également cette maison, comme une maisonnée, donc probablement avec des enfants présents ou à venir. Et même un jardin comme dans les contes de fées qui se terminent bien.

    2-Comment je comprends ce qu'a voulu dire René Char ? Mes hypothèses de sens.

    Une réponse possible de LD :
    Epoux ou épouse, au lieu de mari et femme, emploie une langue littéraire ou précieuse. Le verbe épouser a pris également le sens de « s'adapter parfaitement » (épouser une courbe, une trajectoire) et aussi d' « adopter », « faire sien ». C'est ce sens figuré qui est connoté ici car ce n'est pas une femme qui est épousée, mais une « maison », avec tous les sens de ce mot : batiment d'habitation, mais aussi « foyer » et ensemble des habitants et personnels de cette maison, entreprise ou établisseent, communauté (« j'ai fait plusieurs maisons »), dynastie (« maison royale »). Voir aussi le « fait maison », « genre maison » (propre à la mentalité, à l'esprit d'un groupe ou d'une institution).
    Nous formons l'hypothèse que le poète évoque métaphoriquement par le mot « maison » l'ensemble des communautés humaines auxquelles un homme peut être rattaché, par choix ou par naissance : famille, patrie, religion, mais aussi toute appartenance géographique, ethnique, culturelle, sexuelle, y compris les organisations sociales telles que les partis et choix ou engagements, convictions politiques et culturelleS. La recommandation du poète est apparemment brutalement contradictoire : « Epouse et n'épouse pas... », c'est à dire sois capable d'épouser pleinement une communauté d'identité, d'intérêt, de valeurs, d'y prendre toute ta place (y compris avec toute la promesse de bonheurs divers, charnels, amoureux, procréateurs, générateurs des riches significations du verbe « épouser »). Mais attention, sois simultanément capable de ne pas en être prisonnier, de savoir t'en défaire, de prendre du recul, de connaître d'autres expériences diversifiées, d' « épouser » peut-être d'autres maisons, d'autres mentalités, de savoir traverser la barrière des identités fermées sur elles-mêmes.
    Le poète a probablement ressenti les dangers du fanatisme qui vient en tentation de tout engagement violent et guerrier, ici dans la Résistance anti-nazie, et la nécessité de se déprendre des affects immédiats de l'embrigadement, pour voir plus loin. Et puis là encore, il a parlé pour toutes les expériences humaines, y compris pour le temps de paix retrouvée. Ce vers est un poème de formation, un peu comme les « romans de formation ».

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  3. Je remercie Luc D, dont je lis a l'instant l'analyse, qui enrichit et prolonge la mienne... Et qui eclaire parfaitement les raisons pour lesquelles je tiens a citer ces mots en exergue de l'histoire que je viens d'ecrire. Merci de cette belle attention a Rene Char,LD.

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